Ce constat résultant en partie des choix des médias qui privilégient de mettre en avant d'autres thématiques lors de ces pseudos " confrontations " télévisuelles .
Que se serait passé si la première question posée hier aux 2 candidats avait été " Quelle est votre position par rapport au changement climatique ? "
Nous ne le saurons jamais puisque aucun des metteurs en scène de ce spectacle grotesque n'a conscience de la centralité de ce problème.
Faut il se résigner à remettre ces problématiques à plus tard jusqu'à ce qu'il soit trop tard ?
Fort heureusement ce matin Reporterre comme souvent a su se distinguer pour tenter de recadrer les priorités.
Source Reporterre : 4 mai 2017 / Jean Foyer et Amy Dahan
En décembre 2015, la COP21 avait imposé la question climatique sur les agendas politiques. Aujourd’hui, expliquent les auteurs de cette tribune, la « climatisation » a reculé : le déni est aux commandes aux Etats-Unis et en Russie, et la campagne présidentielle française a, sauf à gauche, oublié le climat.
Jean Foyer est sociologue et politologue à l’Institut des sciences de la communication (ISCC-CNRS). Il a codirigé la rédaction de l’ouvrage Globalising the Climate. COP21 and the climatisation of global debates. Amy Dahan est mathématicienne et historienne des sciences, directrice de recherche émérite au CNRS.
Il y a un an et demi, la COP21 se présentait comme une réunion historique du processus de négociation onusien sur le changement climatique, la réunion de la « dernière chance » pour sauver la planète. Malgré les critiques de la société civile et de quelques analystes, le pari a semblé gagné, avec la signature d’un accord de 192 pays qui allait même jusqu’à relever — sur le papier — le niveau d’ambition de la lutte contre le changement climatique. Puis, dans l’élan impulsé par la COP, l’accord était ratifié à une vitesse inédite, y compris par le couple États-Unis — Chine, qui en avait été moteur. Dans une gouvernance quasi magique et « incantatoire » [1], la rhétorique officielle fonctionnait à plein régime, répétant que « les planètes étaient alignées » et que l’accord allait agir comme une « prophétie autoréalisatrice ».
Nous avons analysé cet événement comme la culmination d’un vaste mouvement de « climatisation du monde » [2] au sens où la problématique climatique s’est imposée toujours davantage comme un des principaux problèmes globaux discutés aussi bien dans les arènes onusiennes qu’au sein du mouvement altermondialiste ; problème capable d’englober d’abord les questions énergétiques évidemment, mais aussi celles du développement, de la sécurité ou encore de l’alimentation. Depuis le « business », soucieux de retourner les accusations contre le modèle de production en une « opportunité pour le marché », jusqu’à l’agriculture devenant tout à coup « climate smart », en passant par l’encyclique du pape François, aucun secteur social n’a paru pouvoir résister à l’attraction exercée par les enjeux climatiques, un problème qu’aucune force ou acteur public ne pouvait plus ignorer. La climatisation revêtait des formes très diverses, plus ou moins stratégiques, du simple greenwashing à quelques initiatives d’envergure menées au nom du climat dans certains pays, et en particulier le secteur énergétique. On peut voir cette « climatisation » comme une déclinaison singulière et sans doute dominante, d’un mouvement plus général d’environnementalisation de nos sociétés, c’est-à-dire de prise de conscience des problèmes écologiques, avec toutes ses ambigüités.
Ces signaux ont été captés chez nous par une partie de la droite française, Sarkozy et Fillon en tête, dont le climatoscepticisme s’est trouvé désinhibé. Si une partie de la gauche semble avoir légèrement écologisé son discours, la place de la question climatique dans le débat de la présidentielle relativise ce mouvement. Les enjeux climatiques et environnementaux demeurent très loin derrière ceux de sécurité, d’emplois et de migrations dans le débat public et l’agenda politique. Contre la voie détestable du repli identitaire et nationaliste, la voie européenne et l’ouverture au monde global, aussi souhaitables soient-elles, doivent impérativement aller de pair avec une prise de conscience des limites planétaires et une repensée profonde de l’éthos moderne et progressiste.
À l’heure où il aurait fallu drastiquement accélérer la lutte contre le changement climatique, nous ne nous contentons pas de stagner, nous reculons. À se demander si, dans l’inconscient collectif, les grandes messes comme la COP21 ne sont que de vastes performances de sérieux où le monde fait semblant de vouloir enrayer le réchauffement climatique et ainsi, faire durer le non durable.
Il y a un an et demi, la COP21 se présentait comme une réunion historique du processus de négociation onusien sur le changement climatique, la réunion de la « dernière chance » pour sauver la planète. Malgré les critiques de la société civile et de quelques analystes, le pari a semblé gagné, avec la signature d’un accord de 192 pays qui allait même jusqu’à relever — sur le papier — le niveau d’ambition de la lutte contre le changement climatique. Puis, dans l’élan impulsé par la COP, l’accord était ratifié à une vitesse inédite, y compris par le couple États-Unis — Chine, qui en avait été moteur. Dans une gouvernance quasi magique et « incantatoire » [1], la rhétorique officielle fonctionnait à plein régime, répétant que « les planètes étaient alignées » et que l’accord allait agir comme une « prophétie autoréalisatrice ».
Nous avons analysé cet événement comme la culmination d’un vaste mouvement de « climatisation du monde » [2] au sens où la problématique climatique s’est imposée toujours davantage comme un des principaux problèmes globaux discutés aussi bien dans les arènes onusiennes qu’au sein du mouvement altermondialiste ; problème capable d’englober d’abord les questions énergétiques évidemment, mais aussi celles du développement, de la sécurité ou encore de l’alimentation. Depuis le « business », soucieux de retourner les accusations contre le modèle de production en une « opportunité pour le marché », jusqu’à l’agriculture devenant tout à coup « climate smart », en passant par l’encyclique du pape François, aucun secteur social n’a paru pouvoir résister à l’attraction exercée par les enjeux climatiques, un problème qu’aucune force ou acteur public ne pouvait plus ignorer. La climatisation revêtait des formes très diverses, plus ou moins stratégiques, du simple greenwashing à quelques initiatives d’envergure menées au nom du climat dans certains pays, et en particulier le secteur énergétique. On peut voir cette « climatisation » comme une déclinaison singulière et sans doute dominante, d’un mouvement plus général d’environnementalisation de nos sociétés, c’est-à-dire de prise de conscience des problèmes écologiques, avec toutes ses ambigüités.
L’élection de Trump, l’une des plus cruelles leçons de réalisme pour la gouvernance climatique
En fait, si la climatisation du monde est un mouvement de fond qui continue de travailler nos sociétés, elle reste essentiellement un mouvement symbolique, qui ne s’actualise que fort peu dans des actions concrètes à la hauteur du problème. L’idée de climatisation s’est avérée tout à fait compatible avec une autre caractérisation du régime climatique : celle d’un « schisme de réalité » [3]. Cette notion renvoie au hiatus profond entre la vision globale et managériale du problème dans les arènes onusiennes d’une part, et le monde réel tel qu’il fonctionne, marqué par la violence des rapports de force géopolitiques, la concurrence économique effrénée, la domination des modes gaspilleurs de production et de consommation capitalistes et l’inertie destructrice de la crise écologique, d’autre part.- Le slogan de campagne de Donald Trump dans l’État de Californie, en novembre 2016.
Nous ne nous contentons pas de stagner, nous reculons
Plus fondamentalement, ce déni impudent de Trump et de certaines élites paraît signer la fin de l’idéal d’un monde commun, que le rêve libéral d’après-guerre et le multilatéralisme ambitionnaient encore de partager. Trump ne veut plus rien partager du tout, il ne cherche même plus à construire un ordre mondial commun : « America first ! » Le trumpisme sonne un double hallali. Comme l’écrit Bruno Latour, « nous sommes tous pris au milieu de ce qui ressemble de plus en plus à un début de panique en cas d’incendie dans un théâtre : il y a ceux qui continuent de fuir vers les protections assurées par une explosion inouïe des inégalités — ce qu’on résume par le terme commode du 1 % des 1 % — et ceux qui fuient à rebours vers la protection, elle tout à fait imaginaire, donnée par les frontières nationales ou ethniques. Au milieu, il y a tous ceux qu’on risque de piétiner… » [4].Ces signaux ont été captés chez nous par une partie de la droite française, Sarkozy et Fillon en tête, dont le climatoscepticisme s’est trouvé désinhibé. Si une partie de la gauche semble avoir légèrement écologisé son discours, la place de la question climatique dans le débat de la présidentielle relativise ce mouvement. Les enjeux climatiques et environnementaux demeurent très loin derrière ceux de sécurité, d’emplois et de migrations dans le débat public et l’agenda politique. Contre la voie détestable du repli identitaire et nationaliste, la voie européenne et l’ouverture au monde global, aussi souhaitables soient-elles, doivent impérativement aller de pair avec une prise de conscience des limites planétaires et une repensée profonde de l’éthos moderne et progressiste.
À l’heure où il aurait fallu drastiquement accélérer la lutte contre le changement climatique, nous ne nous contentons pas de stagner, nous reculons. À se demander si, dans l’inconscient collectif, les grandes messes comme la COP21 ne sont que de vastes performances de sérieux où le monde fait semblant de vouloir enrayer le réchauffement climatique et ainsi, faire durer le non durable.
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